La Grande Loge du Rite Standard d’Écosse pratiquera le Rite Standard d’Écosse version « historique » introduit en 1986 en France. Le texte ci-après en rappelle les fondements et l’histoire.
Le Rite Standard d’Écosse : Histoire, Esprit et Pratique d’un Joyau Maçonnique
Chapitre 1 : Généralités et Fondements du Rite
Le Rite Standard d’Écosse (RSE) est bien plus qu’un simple rituel ; c’est une immersion dans les sources opératives et spirituelles de la franc-maçonnerie. Dénomination française d’un rite anglo-saxon pratiqué dès le début du XVIIe siècle dans les premières loges écossaises (comme Mary’s Chapel ou Kilwinning n°0, fondée avant 1598), il incarne une tradition vivante.
Contrairement à ce que son nom pourrait suggérer, le terme « Standard » ne signifie pas « standardisé ». Il désigne le fonds commun, le socle de pratiques partagées par les près de 1700 loges écossaises, qui chacune conserve ses particularismes. Codifié au XIXe siècle (la version de référence date de 1969), le Rite Standard d’Écosse puise ainsi sa force dans une riche tradition orale séculaire.
Sa singularité réside dans plusieurs piliers fondamentaux :
- La Transmission Orale : À l’image des tailleurs de pierre médiévaux qui protégeaient ainsi leurs secrets de métier, le rituel est intégralement travaillé par cœur par l’ensemble des officiers. Seules les prières et lectures bibliques, considérées comme des textes profanes, sont lues. Cette pratique forge la mémoire, l’intimité avec le symbolisme et unit la Loge dans un souffle commun.
- Une Spiritualité Joyeuse et Affirmée : La croyance en un Dieu révélé est le fondement indispensable. Cette spiritualité, loin d’être austère, est rythmée par la musique et le chant (hymnes ouvrant et fermant les travaux) et s’exprime sous le regard des Trois Grandes Lumières placées au centre de la Loge.
- L’Accueil et la Fraternité : Le candidat est accompagné et guidé, et non éprouvé. Point de cabinets de réflexion ou de passages sous le bandeau. Chaque cérémonie se conclut par de chaleureux applaudissements, signes d’une fraternité immédiate et sincère.
- Le Respect de la Forme : Le vouvoiement, l’usage du prénom et du nom, la prise de parole ritualisée et les déplacements fluides instaurent un cadre de respect et de distinction qui nourrit le fond.
- Un Parcours Cohérent : On parle de « degrés » (et non de grades). Un candidat reçoit les trois degrés symboliques au cours d’une même année maçonnique, devenant un membre à part entière dès son initiation. Le rite entretient un rapport essentiel avec le degré complémentaire de la « Maître de la Marque », s’inscrivant dans un système complet « Beyond the Craft ».
Chapitre 2 : L’Introduction du Rite Standard d’Écosse en France : L’Épopée de Pionniers Visionnaires
L’arrivée du Rite Standard d’Écosse en France est une aventure humaine portée par la passion de Frères visionnaires, dont les figures indissociables sont Jean-Claude Desbrosse, Michel Cosse et Raymond Got.
- Jean-Claude Desbrosse, prêtre et éminent historien, fut le visionnaire. Séduit lors de ses voyages par la maçonnerie écossaise – authentique, rigoureuse et chaleureuse – il nourrit le rêve d’importer cet esprit en France. Initie en 1980, il entama dès le milieu des années 80 des démarches auprès de la Grande Loge d’Écosse.
- Michel Cosse, linguiste, fut le passeur indispensable. Parrainé par l’abbé Desbrosse, il entreprit en 1986 la traduction minutieuse des rituels à partir des textes de référence écossais (The « Standard » Ritual of Scottish Freemasonry, 1969). Il fut le premier Vénérable Maître à pratiquer le rite intégralement par cœur.
- Raymond Got, alors Grand Maître Provincial de la G.L.N.F., fut le garant institutionnel. Malgré les réticences de certaines instances, son soutien bienveillant et circonspect permit au projet de voir le jour. C’est chez lui que le texte du rituel fut officialisé, avec quelques adaptations mineures pour le contexte français.
Le creuset de cette aventure fut la Loge Gislebertus N° 478 à l’Orient d’Autun, créée en 1986 au sein de la G.L.N.F. Elle en fut le laboratoire et le conservatoire, essaimant rapidement et donnant naissance à de nombreuses loges-filles. Des voyages maçonniques fondateurs en Écosse et en Terre Sainte forgèrent une fraternité indéfectible et ancrèrent la pratique du rite.
Le rite fut officiellement reconnu le 25 mai 2000 par la constitution de la Loge Nationale d’Instruction Kilwinning. Tragiquement, ses deux artisans principaux, Jean-Claude Desbrosse et Michel Cosse, nous quittèrent respectivement en 1999 et 2001, sans voir pleinement l’aboutissement de leur œuvre. Leur héritage est aujourd’hui perpétué par des loges au sein de plusieurs obédiences (G.L.N.F, G.L.T.S.O., G.L.A.M.F., G.L.T.F., G.L.I.F.), portant haut les couleurs du tartan « Royal Stuart » sur leur tablier porté sous la veste, selon l’usage ancien.
Chapitre 3 : La Transmission Orale : Cœur et Âme de la Pratique du Rite
« Tout est dans le rituel… » Cette maxime de Jean-Claude Desbrosse résume l’essence du Rite Standard d’Écosse. L’Obligation du premier degré est sans équivoque : les secrets ne doivent être ni écrits ni tracés. La transmission ne saurait donc être qu’orale.
Pourquoi cet impératif ?
Au-delà de la tradition historique, le travail de mémoire est un outil de perfectionnement personnel formidable. Il exige concentration, discipline et dépasse la simple récitation. Apprendre par cœur, c’est digérer et s’approprier le texte jusqu’à en faire sa vérité intérieure (« connaître »). Il quitte alors le statut de jeu de rôle pour entrer dans le vécu, favorisant une dimension spirituelle plus intense et un égrégore puissant.
Comment s’y prendre ?
Il n’existe pas de méthode unique, mais des principes éprouvés :
- Multiplier les canaux sensoriels : Lire, écrire, écouter des enregistrements.
- Travailler « en situation » : Répéter à haute voix, debout, en se déplaçant, pour que le corps mémorise avec l’esprit.
- S’entraîner avec un Frère souffleur : Désigné pour sécuriser l’officier et relancer la mémoire en cas de défaillance, sans dogmatisme sur la lettre.
- Persévérer : La mémoire est un muscle qui se fortifie. La satisfaction d’avoir « bien œuvré » et la gratitude des Frères sont la plus belle récompense.
L’enjeu est de taille : connaître son texte permet à l’officier d’être entièrement disponible, de regarder le candidat pour créer une connexion authentique, et d’incarner pleinement la parole pour une transmission vivante, bien loin d’une simple lecture ou d’une récitation mécanique.
Conclusion : Un Héritage Vivant
Le Rite Standard d’Écosse offre un parcours initiatique complet, exigeant et profondément fraternel. Il est l’héritage précieux de pionniers passionnés et invite à vivre une franc-maçonnerie authentique, où le cœur et l’esprit marchent main dans la main sur le chemin de la lumière, guidés par la beauté d’une tradition orale millénaire.